vendredi, 16 février 2007

Réformons les successions

Notre Code Civil fêtera cette année son centième anniversaire. Il contient parmi les éléments les plus essentiels du droit privé suisse, comme le droit des personnes, des choses, de la famille ou des successions. J’aimerais m’arrêter sur cette dernière partie, le droit des successions, qui a pris un sérieux coup de vieux ces dernières décennies.

Quel est le but de notre système successoral ? Il me semble que l’idée générale est que les biens accumulés durant notre vie doivent revenir dans la mesure du possible à notre descendance. La preuve en est l’absence d’impôt sur les successions en ligne directe dans la plupart des cantons, alors que les successions « indirectes » sont largement taxées.

Le droit actuel fonctionne très bien pour la famille dite « classique ». Au décès d’un époux, la moitié des biens revient aux enfants, l’autre moitié à l’époux survivant. Au décès de l’époux survivant, les biens reviennent aux enfants, qui bénéficient au final de l’ensemble de la succession. Si ce système fonctionne très bien pour une famille unie avec des enfants, tous légitimes et issus du même mariage, le problème est tout différent en cas de divorce, de second mariage, d’enfant d’autre lit, etc. Si ces situations existaient il y a un siècle, elles étaient sans doute bien moins fréquentes qu’aujourd’hui. Sachant que presque la moitié des couples divorcent, il est intéressant de réfléchir aux conséquences successorales de ces divorces.

Prenons un exemple. Imaginez un père de famille, Pierre, qui divorce après avoir eu un enfant, Jean, avec une première femme, puis se remarie avec une seconde, Sophie, sans avoir de nouvel enfant. Que se passe-t-il si Pierre décède avant Sophie ? La moitié des biens de Pierre ainsi que tous les biens de sa famille reviendront à Jean, l’autre moitié à Sophie. Au décès de celle-ci, l’ensemble des biens reviendront à sa famille, mais rien à Jean, pourtant l’enfant de Pierre. Une partie de l’héritage familial de Pierre va se retrouver dans une famille complètement extérieure alors qu’une succession directe était possible.

Imaginons la situation inverse, où Sophie décède en premier. Pierre héritera des trois quarts des biens de Sophie, le quart restant étant destiné aux parents (et aux frères, cousins, etc.) de la seconde épouse. Au décès de Pierre, Jean touchera l’ensemble des biens de sa famille, tous ceux de son père, et les ¾ de ceux de sa belle-mère !

L’exemple est peut-être difficile à suivre, mais imaginez que vous ajoutez un enfant commun, un enfant de Sophie d’un premier lit, et une première épouse mariée, on arrive à un remake de top model, situation finalement pas si extraordinaire. On voit ici que pour un enfant issu d’une famille recomposée, la différence en part d’héritage peut varier du simple au quasi quadruple, selon l’ordre des décès de son entourage. Il est temps que le Code Civil soit adapté aux évolutions de notre société, et en particulier aux nouvelles formes de familles. Même s’il serait sans doute préférable que le nombre de divorce diminue, on ne peut pas légitiment faire porter aux enfants le poids du choix des parents. Beaucoup de partis parlent aujourd’hui de politique familiale. Il ne faut pas oublier qu’une famille n’est pas seulement un couple marié avec deux enfants. Les familles monoparentales ou recomposées constituent une part important des familles de ce pays et les oublier n’est ni juste, ni opportun.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Vous avez tout à fait raison et c'est le cas de mon fiancé. Il est issu avec son soeur d'un premier mariage et sa garde a été attribué à son père alors que celle de sa soeur a été attribué à sa mère. Et maintenant son père est remarié à une femme qui a déjà un enfant d'une autre union. C'est la galère, et il risque gros je crois si sa belle-mère meurt avant son père!

Anonyme a dit…

Interesting to know.